Atelier d’écriture n°23 : le ou les silences

Bonjour, bonjour les hirondelles, y’a d’la joie! Voici mon atelier d’écriture réalisé avec Des mots en Douce pour le mois de novembre 2021. Le thème abordé est le ou les silences! J’ai ajouté également les exercices de mise en bouche. Enjoy!

Silence(s)

Exos :

I / Choisir une citation, petit texte

Le silence, c’est la mort. Bien sûr pour le principal concerné, et ensuite pour toute sa clique. Impuissante. Le silence, c’est laisser passer le danger. Celui de recevoir un mauvais coup. J’ai entendu le silence en restant jusqu’à la fin du film, l’écran noir a provoqué un blanc. « T’as aimé ? » J’ai gardé le silence. Ce que j’ai préféré, c’est le cessement du bruit du pop-corn mastiqué par des bœufs. J’écris en silence. J’entends les mouches voler. Enfin j’aimerais bien.

 

II / J’ouvre la fenêtre… (garder la thématique du silence et broder autour de la solitude)

J’ouvre la fenêtre, la solitude se promène en silence dans la rue. Je lui fais signe, elle ne me voit pas. Faut dire qu’elle n’aime pas la compagnie. Tant pis. Un autre silence déambule avec une autre solitude. Pas de bruit, pas d’amis. Je referme ma fenêtre. Me voilà plongé à nouveau dans le silence. M’apparait alors ma solitude :

– Bonjour ! lui dis-je

Aussitôt elle disparait. Je suis triste. Au bout de quelques instants silencieux, elle me revient. En conséquence, je ferme ma gueule pour profiter de mon amie muette.

Texte principal :

III / Ecrire le journal intime d’une jeune fille, 16 ans, « aujourd’hui »

Aujourd’hui, mon grand-père est entré dans ma chambre. C’est chez lui. Il a pris bien soin de ne pas faire grincer les lames du parquet, ainsi que de ne pas laisser la porte claquer. J’ai gardé le silence.

Il est parti d’un pas feutré, celui de ses charentaises. Puis c’est mon père qui a toqué à la porte. « Tout va bien ? Je n’entendais pas à un chat. » Il reste un moment planté là, la tête coincé entre la porte et l’encadrement. « Je peux entrer ? Qu’on discute un peu… » Nous n’avons pas échangé un mot. J’ai préféré me taire. Il a fini par partir.

Aujourd’hui encore, je distinguais les bruits caractéristiques de bruits de souris. C’était ma mère dans le couloir. Elle est la maitresse de maison. Rien ne lui échappe. Elle traverse par nécessité impérieuse le couloir, faisant semblant d’échapper un bout de tissu tout juste repassé. Elle prend le temps de le ramasser, de bien le replier. Assez pour coller son oreille à ma porte. Je refermais d’un coup sec mon carnet intime. Comme pour chasser une vilaine mouche. D’ailleurs ma mère continua sa ronde sans lâcher un mot. Je restais mutique.

Que ne puis-je écrire dans mon carnet intime, pour me cacher aux autres et à moi-même. Car j’ai l’intime conviction qu’on me lit. Un silence cache-t-il une horreur ou une complicité ? J’ai bien le temps de ne pas me prononcer pour dire ce que je voudrai plus tard.

IV / 10 ans plus tard, on retrouve le journal.

Moi aussi, je retombais sur mon carnet intime. Grand-père mange les pissenlits par la racine depuis longtemps. Je crois que mon innocence est enterrée avec lui. J’étudie. Ma vie chez la psy et la médecine vétérinaire à la fac. Je dissèque des animaux, répare des bobos et caresse des lapins. Je me vois encore chez mamie, l’observant suspendre un par les pattes arrière, donner de grands coups de burin derrière sa nuque. Les bruits, les débattements. Le silence d’un filet de sang coulant par terre. Je vois le couteau l’égorger. Le regard du lapin se vide. On dirait qu’il s’endort. Puis en silence, elle lui arrache sa peau et extrait ses viscères.

J’en ai trois dans ma chambre d’étudiante, ils sont en semi-liberté. C’est grâce à eux que je suis retombée dans mes souvenirs telle Alice au pays des merveilles. Ils grignotaient ma bibliothèque. Maintenant je me relis, je me revois, je me juge. Tant d’intelligence dans tant de naïveté, tant de féminité dans une si jeune fille. Je me remémore les silences. Ce qu’ils contiennent. Ironiquement, il n’y a pas assez d’espace dans mon carnet intime pour les combler, les expliciter. Maintenant j’ai Word sur mon Mac. Je vais épancher mon histoire de jeune femme. J’ai participé à plusieurs soirées étudiantes. Plutôt on m’y a incité. J’écris l’alcool… et le reste. Finalement, je préfère garder le silence. Je serai bientôt vétérinaire.

V/ 50 ans plus tard

Les pages de mon carnet intime ont jauni. Dans le reflet du miroir, j’ai pali. J’ai mené ma vie de femme bravement, parmi les hommes et les animaux, les confondant parfois. J’en ai baisé certains, caressé d’autres. J’ai survécu à moult lapins. N’écrivez pas la vérité, tout du moins ce que vous pensez enfant, car à la relecture c’est bien cruel. Comme mamie dans un seau « nettoyait » le civet, je dévide ma vie dans mon carnet intime. Cela semble si vrai. On ne se venge pas du temps car il est inviolable. Mais des hommes, des femmes, ceux qui existent encore ou vont bientôt mourir, on…

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